Opposition

En l’an 2E 580, dans le camp de l’unité de Lothelil, tous vaquaient à leurs occupations. Cela faisait maintenant plusieurs mois que le campement était établie. Depuis leur arrivée, deux ancres avaient été fermées et un rituel abrogé. Les éclaireurs enquêtaient sur le réseau des adeptes. La routine s’était installée naturellement. Ici, comme à la caserne, tout avait sa place. Ce matin là, un messager de Prime-tenure arriva avec des nouvelles d’Auridia et s’entretint avec le commandant et ses officiers. Le roi Altmer était décédé quelques semaines auparavant. Durant le couronnement du prince Naemon, la princesse Ayreen, première héritière du défunt roi, réapparut en revendiquant son accession au trône. Les hautes instances couronnèrent donc Ayreen plutôt que son frère. La reine Ayreen, comme première action de son règne, fit ratifier les traités pour la constitution du Domaine d’Aldmérie et se lança dans la guerre des Alliances. Le commandant questionna le messager sur les desseins de la reine. Celui-ci lui expliqua que la reine semblait s’intéresser particulièrement au trône de Cyrodil. De faite, la reine rapatriait toute son armée à Faneracine, devenue la capitale du Domaine. A ce mandement, le commandant tapa du poing sur la table, faisant sursauter toutes les personnes présentes. Lothelil ne s’était encore jamais emporté en dehors de la présence exclusive de ses officiers. Il congédia le messager d’un geste exaspéré avant de se laisser tomber sur une chaise. Le commandant se passa une main sur le visage et ouvra le débat sur la raison d’un tel ordre. Abandonner le combat contre le prince Daedra au profit de la guerre des Alliances n’était en rien la vocation de l’unité, tous les officiers étaient unanimes. Bien d’accord avec ces officiers, le commandant Lothelil dépêcha alors son officier le plus diplomate, Aren Hirindiel, et quelques uns de ses meilleurs combattants pour se rendre à Faneracine défendre leur mission. Le reste de l’unité resterait stationnée à Prasin et continuerait le combat durant leur absence.

En sortant de la tente du commandement, Lothelil expliqua à son unité la tournure des évènements. Les combattants manifestèrent leur mécontentement face à de tels ordres, dans le calme et la discipline. Le commandant répondit à leur protestation en leur expliquant ce qui avait été décidé, l’officier Hirindiel et quelques membres partiraient à Faneracine pour défendre l’urgence et la nécessité de leur mission pendant que le reste de l’unité continuerait le combat ici. L’approbation de l’unité se fit de vives voix et les discussions sur les objectifs de la reine Ayreen allèrent bon train. Laissant leur frustration s’épancher, les officiers se réunirent à nouveau pour établir leurs stratégies et pallier au départ de l’officier Hirindiel et de son escorte. Après cette mise au point avec le commandant, Faejine rejoignit sa tente, très en colère contre la reine. Sa disparition était déjà étrange à l’époque, mais sa réapparition l’était encore plus. Pourquoi était-elle partie? Où était-elle pendant ces treize ou quatorze dernières années? Que faisait-elle? Pour le compte de qui? Pourquoi ressurgir maintenant, à la mort du roi? Simplement pour monter sur le trône? Quels étaient les objectifs que cachait sa disparition? Tant de questions, Faejine espérait seulement que la concentration de la reine sur la guerre des Alliances n’avait rien à voir avec les investigations du prince Daedra. Les desseins de la reine Ayreen ne l’intéressaient pas outre mesure, tant qu’elle pouvait se battre contre les engeances d’Oblivion. Elle décida de laisser ces problèmes de côté. Tout comme le reste de l’unité, Faejine comptait sur les négociations avec la reine pour leur permettre de continuer le combat à Prasin.

Cela faisait une dizaine de jours que le messager était reparti, accompagné de l’officier Hirindiel, chargé de défendre la cause de l’unité. Lothelil pensait recevoir une réponse dans les prochains jours, mais il avait encore fort à faire avec les ancres noires de la région. Tout le monde était très occupé depuis le départ du diplomate, si bien qu’en fin de journée, le retour de celui-ci et de son escorte passa presque inaperçue. Les officiers se réunirent dans la tente de commandement pour le rapport quotidien quand les pans de la tente se soulevèrent pour laisser passer Hirindiel. Tous se retournèrent vers lui en silence, le questionnant du regard. Il leur expliqua que la reine Ayreen s’était montrée très ferme, elle avait ordonné le retour de toutes les unités pour les affecter sur le front en Cyrodil. Elle semblait avoir conscience de la menace daedrique mais préférait laisser les guildes s’occuper de ce problème, la guerre des Alliances était sa priorité. Les officiers et le commandant soupirèrent en hochant la tête, certains semblèrent résignés à obéir, mais d’autres refusèrent catégoriquement, prétextant que la cause était plus importante que l’ordre. S’ensuivit un véritable débat, obéir et se rendre en Cyrodil, ou se rebeller et quitter l’armée pour combattre le prince Daedra. Deux clans se formèrent petit à petit, ne trouvant pas d’accord. Les officiers, dans un ultime espoir de trouver un compromis, se tournèrent vers leur commandant, lui laissant le dernier mot. Bien conscient de la position et des arguments de chacun, il décida de laisser le choix à chacun de suivre leurs vocations. L’officier Hirindiel ayant anticipé ce choix avait réussi à négocier la démission des membres de son unité sans implication néfaste, ceux le souhaitant pouvaient donc quitter l’armée d’une simple lettre. Le commandant demanda alors à ces hommes souhaitant partir de rédiger leur lettre de démission de l’armée pour ne pas partir en déserteurs. Ceux souhaitant rester dans l’armée les apporteraient à la reine, ainsi que les biens de l’armée. Cette solution sembla satisfaire tout le monde, mais signa la fin de l’unité de Lothelil. Ce soir là, le commandant réunit toute son unité pour leur exposer la situation et la solution choisie. Tous prirent leur décision rapidement, ils avaient eu plus d’une semaine de doute où ce choix leur était déjà apparu. Chacun retourna à sa tente, pour rédiger sa lettre de démission pour beaucoup et ranger ses affaires pour tous. Faejine, bien sûre, écrivit sa lettre de démission avec détermination, y expliquant ses raisons avec véhémence.