Rupture

La
formation militaire de Faejine se poursuivait bien. Elle apprit le
maniement de plusieurs armes, mais sa préférée restait le bâton,
amplifiant sa magie et débridant sa créativité. Les rôdeurs chargés de
lui apprendre l’art de la chasse avaient abandonnés l’idée de la voir
aussi douée que son père à l’arc, mais la traque l’amusait encore.
Faejine avait maintenant huit ans, cela faisait maintenant cinq ans
qu’elle n’avait pas vu son père. Gaenry était toujours occupé entre son
poste auprès du prince Naemon, son rôle auprès des rôdeurs de Voilronce
détachés à Prime-tenure et l’entretient de son image. Celle-ci avait
pris une proportion telle qu’il la cultivait plus que tout le reste. Son
comportement devenait incompréhensible pour sa femme et ses proches
Bosmers, par contre, elle collait tout à fait à ce qu’attendaient les
Altmers qui le côtoyaient. Finwee, bien habituée à la vie à Auridia,
inculquait toujours les pratiques de son peuple à sa fille, qui les
suivait à la lettre. Malgré l’absence de son mari, elle ne dit jamais de
mal de Gaenry en la présence de sa fille ou de qui que se soit,
cherchant plutôt à maintenir un lien entre eux. Cependant, quelques mois
avant la fin du premier cycle de l’école militaire, en 2E 573, à l’âge
de neuf ans, Faejine rencontra son père pour la première fois depuis
plusieurs années. Mais cette rencontre bouleversa pour toujours sa vie.
Gaenry, devenu proche des rois bosmer et altmer, ne semblait pas arrêter
son ascension. Il réclama alors de sa fille qu’elle devienne un
commandant des rôdeurs de Voileronce, de sa trempe, à son image, pour ne
pas ternir sa réputation. Ainsi, ses origines bosméries auraient pu
être oubliées. Cette rencontre effaça instantanément l’image que la
jeune bosmer avait jusque là, toutes les éloges que sa mère lui
chantaient, tout l’amour qu’elle lui portait, tout fut balayé en une
rencontre de quelques instants, fruit du hasard. Faejine ne put
pardonner à son père de tenir sa réputation en plus haute importance que
sa famille, pire que ses origines. Renier ainsi les siens et sa nature,
c’était renier le Pacte Vert. Malgrè toute son intelligence et son
éducation, Faejine perdit alors son amour pour son père et commença à
lui vouer une haine démesurée.

Cette
rencontre entre Gaenry et sa fille causa malheureusement encore plus de
désordre que le lien rompu entre eux. Faejine, ne cachant pas ses
sentiments envers son père, troubla sa mère qui devint très affectée pas
cette rupture. Finwee fut prise de chagrin, ne supportant pas ces
querelles et la haine que son premier et unique enfant portait à son
père. Finwee Odria mourut quelques mois après cette rencontre, dans de
sombres circonstances. Beaucoup parlaient de maladie, de fatigue ou
encore d’assassinat. Mais Faejine était convaincue que sa mère s’était
donnée la mort à cause du chagrin. Elle se sentit responsable de sa mort
et rejeta une haine encore plus grande sur Gaenry.

Dès
lors, elle refusa tout contact avec lui et décida de lui prouver son
erreur. Elle s’efforcerait de lui prouver qu’il était possible d’être
respecter en tant que Bosmer, impliquant toute sa culture et ses
coutumes. Elle se plongea avec encore plus d’acharnement dans ses
études, bien déterminée à tout maîtriser. Elle passait tout son temps à
étudier et à ruminer sa haine et sa tristesse. Faejine ne s’ouvrait
désormais plus à personne, son côté espiègle et jovial sembla
disparaître. Elle obtint, quelques mois plus tard, son brevet puis passa
le concours pour entrer dans l’école d’officier de Prime-tenure. La
Bosmer le réussit haut la main, obtenant une bourse d’étude confortable
et s’installa dans le pensionnat. Durant ses études, elle apprit tout ce
qu’elle put. Elle s’entraîna au maniement des armes de manière plus
intense, plus poussée qu’à l’école militaire, l’histoire et la stratégie
prirent une place plus importante également. Elle fut également formée à
mener des enquêtes, étudier les documents et décrypter les codes. Des
cours pour mener les hommes au combat précédèrent aux cours de
politique, d’étiquette et de politesse. Les journées des étudiants
étaient particulièrement difficiles physiquement et mentalement, pensées
pour décourager ceux n’ayant pas la trempes qu’être officiers d’armée
nécessitait.

Passant
son temps à étudier et à ruminer ses sombres pensées, la Bosmer ne
s’ouvrait plus à personne. Elle s’investit exclusivement dans ses
études, et tint bon. Faejine montra un très bon potentiel et ses
professeurs étaient contents d’elle. Son investissement et ses efforts
la firent progresser rapidement, ses camarades devinrent petit à petit
plus âgés qu’elle, certains furent jaloux de son talent. Mais Faejine
n’y accorda pas la moindre attention. Ne parlant à personne, ne
s’intéressant à rien d’autre que ses études, son attitude renfermée, son
regard toujours dur et déterminé semblaient attirer les foudres. Il y
avait bien eu quelques altercations entre la Bosmer et des aînés, mais
elle prenait sur elle, se recentrant sur son objectif. Ses altercations,
ses difficultés et les coutumes de son peuple lui forgèrent le
caractère et la patience. Les coutumes bosmers voulaient que ces
embêtements se règlent par des tours, des farces, mais Faejine ne
cherchait pas à s’engager dans cette spirale. Durant toutes ses études à
l’école d’officiers de Prime-tenure, Gaenry ne se manifesta pas, lui et
sa fille ne se croisèrent même pas une fois.